Interview

Prévention des maladies émergentes d’origine animale : 4 questions à Benjamin Roche

Mis à jour le | Commissariat général au développement durable

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Selon l’Organisation mondiale de la santé, 75 % des maladies infectieuses humaines émergentes de la dernière décennie proviennent d’animaux. Annoncée le 11 janvier 2021 par le Président Emmanuel Macron lors du One Planet Summit, l’initiative PREZODE (Prévenir les risques d’émergences zoonotiques et de pandémies) vise à développer la recherche scientifique sur les stratégies de prévention et d’analyse des maladies transmises par des animaux appelées "zoonoses". Benjamin Roche, biologiste, conseiller scientifique One Health auprès de la Présidente de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et membre du comité préparatoire de l’initiative, répond à nos questions.

Illustration 3015 - Benjamin Roche
Illustration 3015 - Benjamin Roche

1. En quoi consiste l’initiative de recherche PREZODE ?

L’initiative internationale PREZODE répond à 2 objectifs scientifiques : améliorer la surveillance épidémiologique des zones de contact entre homme et animal et développer en amont des méthodes de gestion des écosystèmes permettant de diminuer le risque d’émergence de zoonoses tout en assurant la sécurité alimentaire des populations locales. Il faut améliorer la prévention de ces zoonoses pour réagir plus rapidement lors de l’apparition de l’une d’elles. Depuis le lancement de PREZODE en janvier, 50 pays et plus de 1 000 chercheurs participent à sa construction scientifique. Cette initiative de recherche est complémentaire d’un conseil d’experts de haut niveau composé de 26 experts, chargé d’exprimer des recommandations. Pour construire cette initiative, nous avons un comité préparatoire composé de l’Inrae, du Cirad et de l’IRD. D’ici 2022, l’objectif est de développer un agenda de recherche scientifique et une feuille de route opérationnelle.

2. Pourquoi est-il important d’anticiper l’apparition des zoonoses ?

Zika, Ebola, les grippes aviaires… nous pensions que nous arrivions à contrôler ce qui se passait. Mais avec la Covid 19, nous voyons bien que si un évènement nous échappe, la maladie se propage très rapidement. Avec l’initiative PREZODE, nous travaillons sur la prévention des zoonoses et pas seulement notre préparation face à elle. Nous ne serons jamais sûrs que nous serons prêts pour lutter contre la prochaine zoonose émergente. Ces zoonoses sont les conséquences des activités humaines qui provoquent une perte de biodiversité et augmentent le contact avec une faune sauvage infectée. C’est le cocktail parfait et nous voyons bien qu’une fois le virus sorti, il est plus difficile à contrôler. En termes de coûts sociaux-économiques, la stratégie de prévention évite des pertes humaines et se révèle 100 fois moins coûteuse : la stratégie de prévention coûterait 18 milliards de dollars contre 1 800 milliards comme estimé pour la Covid-19 si on continue à agir après coup.

3. Comment prévoir ces zoonoses ?

L’iniative PREZODE fonctionne sur 5 piliers : comprendre les risques et les réduire, améliorer les systèmes de surveillance, gérer au mieux nos données pour avoir une méthode standardisée au niveau mondial, et renforcer nos capacités de recherche. Par exemple, nous travaillons dans différentes zones du monde pour établir dans chacune d’elles une sorte de mosaïque de zones, entre les zones de protection de la nature où le risque de contact serait limité et des zones qualifiées de « Hot spot » qui demanderaient une surveillance accrue. Nous établissons ainsi des modèles desquels découlent des scénarios à mettre en place. Mais cela doit être fait dans chaque zone spécifique car chaque région a des problématiques sociales et une biodiversité différente. Si une zoonose émerge, on pourrait ainsi identifier rapidement les points de contamination les plus à risques et concentrer les efforts dessus.

4. Comment éviter les tensions entre les besoins de développement des populations locales et la protection de la biodiversité ?

Dans le cadre de nos analyses, nous établissons des modèles qui prennent en compte les spécificités locales, desquels découlent des scénarios à mettre en place. L’objectif est de trouver une stratégie de gestion des écosystèmes qui permette également de subvenir aux besoins des populations locales. C’est pourquoi le travail de recherche doit être fait dans chaque zone spécifique car chaque région a des problématiques sociales et une biodiversité différente. Mais il faut avoir conscience que quoi qu’il advienne, le risque zéro n’existera jamais.

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